Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 21 bis.djvu/472

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Vive le Roi ! Je commençai le premier, et ainsi j’eus passage, et me donnai bien de garde de revenir par le même chemin ; je repassai par le pont Notre-Dame.

Du Pont-Neuf ils le traînèrent par les rues jusqu’à la Bastille, et de là par toutes les autres places de la ville, jusqu’à ce qu’ils le fissent brûler devant sa porte, au faubourg Saint-Germain, et traînèrent ce qui en restoit encore sur le Pont-Neuf, où ils le brûlèrent derechef, puis enfin en jetèrent les os dans la rivière.

Ces choses avoient été prédites au maréchal d’Ancre par plusieurs devins et astrologues qu’il voyoit volontiers, mais lui avoient été prédites par eux en leur manière ordinaire, c’est-à-dire de sorte qu’il n’en pouvoit faire son profit ; car les uns lui disoient qu’il mourroit d’un coup de pistolet, les autres qu’il seroit brûlé, les autres qu’il seroit jeté dans l’eau, les autres qu’il seroit pendu, et toutes ces choses furent véritables ; mais, comme il ne les pouvoit comprendre, il croyoit qu’ils se trompassent tous, et les en avoit à mépris.

La Reine sut les excès qui avoient été commis contre le corps mort ; et, encore que cette princesse se fût toujours montrée fort constante contre les médisances, si est-ce que les insolentes paroles qu’ils dirent la touchèrent au vif : et à la vérité, s’il faut une grande vertu pour supporter la calomnie, il en faut une héroïque et divine pour la supporter quand elle est conjointe avec mépris et risée publique.

Le même jour on fit publier à son de trompe que tous les serviteurs du maréchal eussent à sortir hors de Paris. Le frère de la maréchale, qui étoit logé au