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et le condamnèrent à mort au commencement de mai de la présente année, par la plus signalée ingratitude qui fut jamais commise, car ils n’eussent osé penser autrefois à le perdre ; mais après que par ses sages conseils il les eut mis en état de n’avoir plus besoin de lui, et eut ouvert un chemin si ample et si large à la prospérité de leurs affaires, qu’ils n’avoient point affaire ni nécessité de guide pour les conduire, au lieu de la récompense qu’il méritoit, ils le payèrent d’envie, et lui donnèrent la mort.

L’ambassadeur duRoi, ayant eu avis de ce jugement, et qu’il devoit être exécuté le 13, demanda audience aux États, et ne l’ayant pu obtenir leur manda, par écrit, qu’il avoit charge de Sa Majesté de leur représenter que Sadite Majesté, sans entrer plus avant en connoissance des causes motives de ce jugement, persistoit à les exhorter encore, pour le lieu qu’elle tenoit entre leurs amis et alliés, d’épargner la vie du plus ancien officier de leur république, attendu que, s’il défaut quelque chose à la sûreté de leur État, il ne sera pas suppléé par le peu de sang qui reste à un pauvre vieillard, qui, sans violence, ne peut éviter de mourir bientôt par le cours de la nature, et ils recevroient de l’honneur d’user de clémence pour celui qui a usé sa vie en les servant ; que s’ils ont volonté de lui faire souffrir quelque sorte de peine, il leur est aisé de lui commuer celle de la vie en une moindre, le confinant à demeurer le reste de ses jours en une de ses maisons.

Ces remontrances ne servirent de rien, tant ce peuple étoit animé contre lui, donnant une preuve certaine que, dans les États qui sont sujets aux lois