Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/11

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roit été s’il avoit voulu comme le prince de Condé le vouloit. Beaucoup de gens attribuèrent cette facilité du duc d’Orléans aux intérêts de l’abbé de La Rivière son favori, qu’on accusoit de l’avoir détourné des sentimens ambitieux qu’il avoit eus tant de fois, bien plus mal à propos que dans cette conjoncture, où il avoit raison de faire ses conditions meilleures qu’il ne les fit ; car il se contenta de la qualité de généralissime des armées de France, qui ne laissa pas de lui donner une grande puissance dans le royaume. Enfin, soit que cette facilité fût un effet de la considération qu’il avoit eue pour elle dans les temps où il avoit pu lui nuire plutôt que la servir, dans lesquels il ne lui avoit jamais manqué ; soit qu’elle lui fût inspirée par ceux qui étoient près de lui et dont il pouvoit prendre conseil, qui lui avoient dit sans doute qu’il lui auroit été difficile, quand il l’auroit voulu, dans la disposition où étoient les esprits dans le parlement, d’empêcher que la régence de la Reine n’y fût confirmée et enregistrée sans aucunes bornes, il se déclara pour cela de la meilleure grâce du monde.

Sitôt que la Reine se vit indépendante et maîtresse absolue, elle chassa Chavigny du conseil, et ôta les finances à Boutillier son père pour les donner au président de Bailleul, en qui elle connoissoit beaucoup de probité, sans savoir s’il avoit du talent pour cette charge. En même temps elle envoya à Rome demander le chapeau de cardinal pour l’évêque de Beauvais, rappela la duchesse de Chevreuse de son exil, et fit des grâces à plusieurs particuliers, sans y observer la juste mesure que les grands sont obligés