Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/132

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fils épousât mademoiselle de La Force, grande héritière et bonne huguenote, deux qualités qui les accommodoient davantage, à cause de leur ancien attachement à la religion prétendue réformée. Madame de Boutteville disoit de son côté qu’elle ne consentiroit jamais que sa fille, qui étoit de la maison de Montmorency, épousât personne contre le gré de ses parens ; et qu’elle ne croyoit pas, quoiqu’elle n’eût pas de bien, que ce lui fût un avantage d’entrer dans une maison incommodée, où elle ne porteroit point les richesses qu’elle pourvoit espérer dans une autre, et où par conséquent elle seroit méprisée. Si les pères étoient de même sentiment, le comte de Châtillon et mademoiselle de Boutteville étoient d’accord ensemble pour faire le contraire de ce que leurs proches désiroient. Après avoir fait toutes les choses possibles pour vaincre les difficultés qui s’opposoient à leur bonheur, ils se résolurent d’y apporter le remède qui étoit en leur pouvoir, étant assurés d’être soutenus par le duc d’Enghien, leur parent commun, qui étoit leur protecteur et leur confident. L’amant enleva sa maîtresse, et on crut que sa maîtresse y avoit consenti ; mais comme le cœur humain a beaucoup de plis et de replis, et que dans les aventures de la vie il y a beaucoup de pensées différentes qui contribuent à leur succès, il arriva que le duc d’Enghien, qui aimoit mademoiselle Du Vigean, sut par elle que son père la vouloit marier au comte de Châtillon, et avoit offert au maréchal de Châtillon une dot considérable, pourvu qu’il pût avoir son fils pour gendre. Cette nouvelle avoit donné de furieuses alarmes à ce prince. Il en donnoit souvent aux ennemis de l’État ; mais son cœur