Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/137

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affaire : tout le monde est content ; et les larmes de cette pauvre femme, dont je n’oserois me moquer publiquement, me donnent une grande envie de rire en particulier. Ils ont fait tout ce tripotage sans moi ; et après cela il faut que j’en pâtisse, et que pour récompense de mes peines je ne m’en puisse pas réjouir. » Alors, se tournant toutes deux vers madame de Boutteville, qui continuoit à pleurer et à faire d’inutiles plaintes, la Reine lui dit les plus douces paroles du monde, la consola, lui prédit que quelque jour elle se consoleroit, la pria d’aller se reposer, l’assurant enfin qu’elle auroit soin de la satisfaire. Madame la princesse approuva les conseils de la Reine, et conclut qu’il falloit avoir patience. Le duc d’Amville[1], de la maison de Ventadour, arriva là-dessus. Il étoit neveu de madame la princesse, et par conséquent parent de mademoiselle de Boutteville ; mais, pour son malheur, il étoit amoureux d’elle ; et, dans le trouble où il étoit de cette aventure, il dit à la Reine que le comte de Châtillon avoit commis un attentat qu’il falloit punir ; que sa cousine n’étoit point de condition à être traitée de la sorte, et qu’il la supplioit d’envoyer de ses gardes courir après elle. La Reine lui répondit d’un ton un peu bas : « Mon pauvre Brion, car il avoit autrefois porté ce nom, je vois bien que vous êtes le plus fâché de la compagnie ; mais il n’y a remède, il faut s’y résoudre : votre cousine seroit sans doute bien fâchée de ce secours ; et comme bon parent il faut condescendre à ses inclinations. » Cette harangue obligea le pauvre

  1. Le duc d’Amville : François-Christophe de Lévi, comte de Brion, puis duc d’Amville.