Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 37.djvu/45

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Il ne faut donc pas s’étonner s’il a su se faire estimer par une grande Reine, et pour quelque temps des princes du sang, dont il a eu plusieurs fois l’amitié[1].

La Reine, pour remédier par la paix à ces petits désordres de la cour quelle regardoit comme des bagatelles, ordonna que la duchesse de Montbazon iroit chez madame la princesse lui faire non-seulement des excuses, mais une réparation publique sur ce qui avoit été dit, ou par elle, ou par ceux qui étoient chez elle. Ce qu’elle devoit dire pour cet effet, et les paroles qu’on lui devoit répondre, furent écrites dans le petit cabinet du Louvre, sur les tablettes du cardinal, qui travailloit en apparence pour apaiser toutes ces querelles au contentement des deux parties. J’y étois le soir que toutes ces importantes façons furent examinées et je me souviens que j’admirai dans mon ame quelles sont les folies et les vaines occupations de ce monde. La Reine étoit dans son grand cabinet, et madame la princesse étoit avec elle, qui, tout émue et toute terrible, faisoit de cette affaire un crime de lèse-majesté. Madame de Chevreuse, engagée par mille raisons dans la querelle de sa belle-mère, étoit avec le cardinal Mazarin, pour composer la harangue qu’elle devoit faire. Sur chaque mot, il y avoit un pourparler d’une heure. Le cardinal, faisant l’affairé, alloit d’un côté à l’autre, pour accommoder leur diffé-

  1. Dont il a eu plusieurs fois l’amitié. Le manuscrit ajoute : « Et si en même temps il a pu se faire haïr de toute la France avec tant de marques de mépris et de rage. Puisque notre nation, assez légère de son naturel, ne sauroit guère souffrir de favoris sans les haïr beaucoup, quelque mérite qu’ils aient, et sans se lasser aisément de leur domination, à plus forte raison de celui-ci, dont les défauts ont déplu quasi à tout le monde, et même aux plus sages. »