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MÉMOIRES

convenoit ; parce qu’ayant toute la jeunesse non-seulement chez elle, mais à ses oreilles, les apparentes affaires des autres couvroient la mienne, qui étoit ou du moins qui fut quelque temps après plus effective. Enfin ma conduite me réussit, et au point qu’en vérité je fus fort à la mode parmi les gens de ma profession, et que les dévots même disoient, après M. Vincent, qui m’avoit appliqué ce mot de l’Évangile, que je n’avois pas assez de piété, mais que je n’étois pas trop éloigné du royaume de Dieu.

La fortune me favorisa en cette occasion plus qu’elle n’avoit accoutumé. Je trouvai par hasard Mestresot, fameux ministre de Charenton, chez madame de Rambure, huguenote précieuse et savante. Elle me mit aux mains avec lui par curiosité : la dispute s’engagea, et au point qu’elle eut neuf conférences de suite en neuf jours différens. M. le maréchal de La Force et M. de Turenne[1] se trouvèrent à trois ou quatre. Un gentilhomme de Poitou qui fut présent à toutes se convertit. Comme je n’avois pas encore vingt-six ans, cette conversion fit grand bruit ; et, entre autres effets, elle en produisit un qui n’avoit guère de rapport à sa cause. Je vous le raconterai après que j’aurai rendu justice à une honnêteté que je reçus de Mestresot dans une de ces conférences.

J’avois eu quelques avantages sur lui dans la cinquième ; la question de la vocation y fut traitée. Il m’embarrassa dans la sixième, où l’on traitoit de l’autorité du pape ; parce que, ne me voulant pas brouiller avec Rome, je lui répondois sur des principes qui ne sont pas si aisés à défendre que ceux de Sorbonne.

  1. Henri de la Tour d’Auvergne, né en 1611, et tué en 1675. (A. E.)