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DU CARDINAL DE RETZ.

premières noces ma cousine germaine, ayant voulu sonder le gué, n’y trouva aucun jour. Le Roi lui répondit, avec beaucoup de bonté pour moi, que j’étois encore trop jeune.

Nous découvrîmes quelque temps après un obstacle plus sourd, mais aussi plus dangereux. M. des Noyers, secrétaire d’État, et celui des trois ministres qui paroissoit le mieux à la cour, étoit dévot de profession, et même jésuite secret, à ce que l’on a cru. Il se mit en tête d’être archevêque de Paris : et comme l’on croyoit compter sûrement tous les mois sur la mort de mon oncle, qui étoit dans la vérité fort infirme, il crut qu’il falloit à tout hasard m’éloigner de Paris, où il voyoit que j’étois extrêmement aimé ; et me donner une place qui me parût belle et raisonnable pour un homme de mon âge. Il me fit proposer au Roi par le père Sirmond, jésuite et son confesseur, pour l’évêché d’Agde, qui n’a que vingt-deux paroisses, et qui vaut plus de trente mille livres de rente. Le Roi agréa la proposition avec joie, et il m’en envoya le brevet le jour même. Je vous confesse que je fus embarrassé au-delà de tout ce que je puis vous exprimer. Ma dévotion ne me portoit nullement en Languedoc. Vous voyez les inconvéniens d’un refus, si grands que je n’eusse pas trouvé un homme qui eût osé me le conseiller. Je pris mon parti de moi-même : j’allai trouver le Roi. Je lui dis, après l’avoir remercié, que j’appréhendois extrêmement le poids d’un évêché éloigné ; que mon âge avoit besoin d’avis et de conseils, qui ne se rencontrent jamais que fort imparfaitement dans les provinces. J’ajoutai à cela tout ce que