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[1649] MÉMOIRES

l’avis de demander en forme l’éloignement du cardinal Mazarin, ne furent suivis de personne, et même furent traités d’emportés. Vous observerez, s’il vous plaît, qu’il n’y avoit que la vigueur dans cette conjoncture, où l’on pût trouver apparence de sûreté : je n’en ai jamais vu où j’aie trouvé tant de foiblesse. Je courus toute la nuit, et je ne gagnai que ce que je viens de vous dire.

La chambre des comptes eut le même jour une lettre de cachet, par laquelle il lui étoit ordonné d’aller à Orléans ; et le grand conseil reçut commandement d’aller à Mantes. La chambre dépêcha pour faire des remontrances ; le second offrit d’obéir, mais la ville lui refusa des passeports. Il est aisé de concevoir l’état où je fus tout ce jour-là, qui effectivement me parut le plus affreux de tous ceux que j’eusse passés jusque là dans ma vie : je dis jusque là, car j’en ai eu dans la suite de plus fâcheux. Je voyois le parlement sur le point de mollir, et je me voyois par conséquent dans la nécessité, ou de subir avec lui le joug du monde le plus honteux et même le plus dangereux pour mon particulier, ou de m’ériger purement ou simplement en tribun du peuple, qui est le parti du monde le moins sur et même le plus bas, toutes les fois qu’il n’est pas revêtu de force.

La foiblesse de M. le prince de Conti, qui s’étoit laissé emmener comme un enfant par monsieur son frère ; celle de M. de Longueville, qui, au lieu de venir rassurer ceux avec lesquels il étoit engagti, avoit été offrir à la Reine ses services ; et la déclaration de messieurs de Bouillon et de La Mothe, avoient fort dégarni ce tribunal. L’imprudence du