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qu’à son coucher. Nous causons sans cesse de vous : c’est un sujet qui nous mène bien loin, et qui nous tient uniquement au cœur (5 juin 1675).

« Je fus hier assez heureuse pour aller me promener avec Son Eminence tête a tête au bois de Vincennes : il trouva que l’air me seroit bon. Il n’étoit pas trop accablé d’affaires ; nous fûmes quatre heures ensemble : je crois en avoir bien profité ; du moins les chapitres que nous traitions n’étoient pas indignes de lui. C’est ma véritable consolation que je perds en le perdant : et c’est moi que je pleure et vous aussi, quand je considère toute la tendresse qu’il a pour vous. Son départ achève de m’accablier (12 juin). »

Madame de Sévigné retrace d’une manière touchante le chagrin qu’elle éprouva en se séparant du cardinal de Retz : elle alla lui dire adieu dans une maison de campagne de Caumartin. « J’y fus lundi dernier, dit-elle ; je le trouvai au milieu de ses trois fidèles amis : leur contenance triste me fit venir les larmes aux yeux ; et quand je vis Son Eminence avec sa fermeté, mais avec sa bonté et sa tendresse pour moi, j’eus peine à soutenir cette vue. Après le dîner, nous allâmes causer dans les plus agréables bois du monde : nous y fûmes jusqu’à six heures dans plusieurs sortes de conversations si bonnes, si tendres, si aimables, si obligeantes et pour vous et pour moi, que j’en fus pénétrée. Madame de Caumartin arriva de Paris avec tous les hommes qui étoient restés au logis ; elle vint nous trouver dans ce bois. Je voulus m’en retourner à Paris : ils m’arrêtèrent à coucher sans beaucoup de peine. J’ai mal dormi le matin ;