Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 44.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
82
notice

jusqu’alors donné à personne d’approcher ; et ces doctrines, qui se joignent à un récit vif et intéressant, sont presque toujours soutenues par les ressources de l’imagination la plus forte et la plus brillante. On peut présumer que ce livre ne fut pas inutile à ceux qui, vers la fin du siècle dernier, plongèrent la France dans un abîme de maux : et l’un des membres de la Convention, encore vivant, observe que le fameux Legendre « ne lisoit que les Mémoires du cardinal de Retz, qu’il appeloit le Bréviaire des révolutionnaires[1] »

Au reste, ces Mémoires, quoique écrits avec un ton de franchise qui inspire de la confiance, ne sont pas toujours, surtout en ce qui concerne l’auteur, d’une exactitude à l’abri de reproches. Il cherche continuellement à se faire valoir : il veut avoir rempli le premier rôle dans toutes les affaires, tenu seul le fil de toutes les intrigues, entrepris seul les choses les plus hardies ; et l’on voit, comme l’observe très-bien La Rochefoucauld, que son imagination lui fournit plus que sa mémoire. Il dissimule en même temps avec beaucoup de soin la part que prirent les jansénistes aux troubles de ce temps : mais cette omission se trouve amplement réparée dans les Mémoires de Joly, qui fut l’un de ses agens les plus habiles.

Lorsque l’ouvrage fut publié, Brossette en envoya un exemplaire à Jean-Baptiste Rousseau, qui étoit alors à Vienne (28 février 1718). Cet homme célèbre en porta un jugement qui est aujourd’hui peu connu, et qu’on sera sans doute satisfait de retrouver ici.

« J’ai lu ces Mémoires d’un bout à l’autre avec plus

  1. Mémoires de Thibaudeau, tome i, page 71.