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[1650] MÉMOIRES

même sur des sujets où le Roi trouvoit si peu de profit, que j’eus lieu d’être persuadé qu’il n’agissoit ainsi que pour leur faire voir que leurs protecteurs les avoient abandonnés depuis leur accommodement avec la cour.

Je fus averti d’ailleurs que l’abbé Fouquet cabaloit contre moi chez le menu peuple ; qu’il y jetoit de l’argent, et semoit tous les bruits qui pouvoient me rendre suspect.

La vérité est que tous les subalternes sans exception, qui appréhendoient une union véritable du cardinal et de moi, et qui croyoient qu’elle seroit facile par le mariage de l’aîné Mancini[1] avec mademoiselle de Retz qui est présentement religieuse, ne songèrent qu’à nous brouiller dès le lendemain que nous fûmes raccommodés ; et ils y trouvèrent de la facilité, parce que les ménagemens que j’étois obligé de garder avec le public pour ne me pas perdre leur donnoient lieu de les interpréter à leur mode auprès du Mazarin, et aussi parce que la confiance que M. le duc d’Orléans prit en moi, aussitôt après la prison de M. le prince, devoit par elle-même produire dans son esprit une défiance très-naturelle. Goulas, secrétaire des commandemens de Monsieur, rétabli dans sa maison par la disgrâce de La Rivière qui l’en avoit chassé, contribua beaucoup à la lui donner, par l’intérêt qu’il avoit à affoiblir auprès de son maître par le moyen de la cour ma faveur naissante, qu’il s’imaginoit traverser la sienne. Remarquez que je n’avois pas

  1. N… Mancini, tue en 1652 au combat du faubourg Saint-Antoine. Il étoit fils de Michel-Laurent Mancini et de Hieronyme Mazarini, sœur du cardinal. (A. E.)