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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

de l’abbé de La Rivière, que Monsieur m’avoit offert, et qu’il m’assurât que j’aurois des dégoûts tant que je ne me serois pas érigé moi-même en favori, bien que Madame m’en pressât très-souvent aussi elle-même, bien qu’il n’y eût rien de si facile, parce que Monsieur joignoit à l’inclination qu’il avoit pour ma personne une très-grande considération pour le pouvoir que j’avois dans le public, je demeurai pourtant toujours ferme dans ma première résolution, qui étoit bonne dans le fond, mais qui ne laissa pas d’avoir des inconvéniens par la suite : par exemple, celui sur le sujet duquel je vous fais cette remarque. Si je me fusse logé au palais d’Orléans, et que j’eusse vu les comptes du trésorier de Monsieur, j’eusse donné la moitié de son apanage à qui il m’eût plu ; et quand il l’auroit trouvé mauvais, il ne m’en eût osé rien dire. Je ne voulus pas me mettre sur ce pied. Il ne fut donc pas en mon pouvoir de l’obliger d’assister le roi d’Angleterre de mille pistoles, et j’en eus honte pour lui et pour moi. J’en empruntai quinze cents de M. de Morangis, oncle de celui que vous connoissez ; et je les portai à milord Taff, pour le Roi son maître. Il ne tint qu’à moi d’en être remboursé dès le lendemain, en monnoie même de son pays : car en retournant chez moi sur les onze heures du soir, je rencontrai un certain Tilnei, Anglais, que j’avois connu autrefois à Rome, qui me dit que Vaire, grand parlementaire et très-confident de Cromwell, venoit d’arriver à Paris, et qu’il avoit ordre de me voir. Je me trouvai un peu embarrassé ; je ne crus pas toutefois devoir refuser cette entrevue. Vaire me donna une petite lettre de la part de Cromwell, laquelle n’étoit que de