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[1650] MÉMOIRES

dit depuis deux jours que jamais homme n’avoit servi le Roi plus fidèlement, et que la conduite que la cour prenait à mon égard étoit d’un pernicieux exemple ; que M. de Beaufort avoit juré, devant tout ce qu’il y avoit de gens dans l’antichambre de Monsieur, que si l’on continuoit encore huit jours à agir comme on faisoit, il se prépareroit à soutenir un second siège dans Paris, sous les ordres de Son Altesse Royale ; et que j’avois répondu : « Ils ne sont pas en état de nous assiéger, et nous sommes en état de les combattre. » Qu’elle ne pouvoit pas se figurer que ces discours se fissent à deux pas de Monsieur, si ceux qui les faisoient n’étoient bien assurés de ses intentions ; que celle qui lui paroissoit à elle dans nos esprits, et même dans nos cœurs, n’étoit point mauvaise dans le fond ; que nous nous croyions outragés par le cardinal, mais que la considération de la Reine étoufferoit en moins de rien ce ressentiment, si la défiance ne l’envenimoit ; que c’étoit à quoi il falloit remédier. Vous voyez la chute du discours, qui tomba sur le chapeau. La contestation fut vive : Le Tellier refusa d’en faire la proposition à la cour ; madame de Chevreuse se chargea des conséquences. Il y consentit, à condition que madame de Chevreuse en écrivît de son côté, et mandât qu’elle l’y avoit comme forcé. La cour reçut ces agréables dépêches lorsqu’elle étoit en chemin à son retour de Bordeaux ; et le cardinal en remit la réponse à Fontainebleau.

Le garde des sceaux, qui ne vouloit pas que je fusse cardinal parce qu’il vouloit l’être, et qui vouloit aussi perdre Mazarin parce qu’il vouloit encore devenir ministre, crut qu’il feroit un double coup