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[1651] MÉMOIRES

mémoires juste, et fondé sur le pouvoir légitime de Monsieur ; qu’il étoit même nécessaire : mais que comme il étoit de sa bonté d’obvier à tout ce qui pouvoit arriver de plus violent dans une action de cette nature, ma pensée n’étoit pas qu’il se fallût servir du peuple, comme M. de Chaulnes venoit de dire ; mais qu’il seroit, à ce qu’il me sembloit, plus à propos que Monsieur fît exécuter la chose par son capitaine des gardes ; que M. de Beaufort et moi nous nous pourrions tenir sur les quais qui sont des deux côtés du Palais, pour retenir le peuple, qui n’avoit besoin que de bride partout où le nom de Monsieur paroissoit. M. de Beaufort m’interrompit à ce mot, et il me dit : « Je parlerai pour moi, monsieur, quand j’opinerai ; pourquoi m’alléguer ? » Je faillis à tomber de mon haut, il n’y avoit pas eu entre nous la moindre ombre, je ne dis pas de division, mais de mécontentement. M. de Beaufort continua, en disant qu’il ne répondroit pas que nous pussions contenir le peuple, et l’empêcher de jeter peut-être le premier président dans la rivière. Quelqu’un du parti des princes (je ne me souviens pas précisément si ce fut M. de Nemours ou M. de La Rochefoucauld) releva et orna ce discours de tout ce qui pouvoit donner au mien figure ou couleur d’une exhortation au carnage. M. le prince ajouta qu’il confessoit qu’il n’entendoit rien à la guerre des pots de chambre ; qu’il se sentoit même poltron pour toutes les occasions de tumulte populaire et de sédition ; mais que si Monsieur croyoit être assez outragé pour commencer la guerre civile, il étoit tout prêt à monter à cheval, à se retirer en Bourgogne, et à faire des levées pour son service. M. de Beaufort se