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[1651] MÉMOIRES

fait dès le cinquième. Je le lui fis avouer à lui-même avant que de le quitter, par ce dilemme « Vous appréhendez que M. le prince ne revienne à la cour, parce qu’il en sera le maître. Prenez-vous un bon moyen pour l’en éloigner, en lui ouvrant toutes les portes, et en vous engageant vous-même à sa sûreté ? voulez-vous qu’il y revienne pour avoir plus de facilité à le perdre ? Je ne vous crois pas capable de cette pensée, à l’égard d’un homme à qui vous donnez votre parole à la face de tout un parlement et de tout un royaume. Le voulez-vous faire revenir pour l’accommoder effectivement avec la Reine ? il n’y a rien de mieux pourvu que vous soyez assuré qu’ils ne s’accommoderont pas ensemble contre vous-même, comme ils firent il n’y a pas long-temps : mais je m’imagine que Votre Altesse Royale a bien su prendre ses sûretés. » Monsieur, qui n’en avoit pris aucune, eut honte de ce que je lui représentois avec assez de force ; et il me dit « Voilà des inconvéniens ; mais que faire en l’état où sont les choses ? Ils se raccommoderont tous ensemble, et je demeurerai seul comme l’autre fois. — Si vous me commandez, monsieur, lui répondis-je, de parler à la Reine de votre part aux termes que je vais proposer à Votre Altesse Royale, j’ose vous répondre que vous verrez, au moins bientôt, clair dans vos affaires. » Il me donna la carte blanche, ce qu’il faisoit toujours avec facilité quand il se trouvoit embarrassé. Je la remplis d’une manière qui lui agréa : je lui expliquai le tour que je donnerois à ce que je dirois à la Reine. Il l’approuva ; et je fis supplier la Reine par Gabouri dès le soir même,