Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/326

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role, et continua en me commandant de lui dire mon sentiment sur l’état où étoient les choses : « car, ajouta-t-elle je ne puis faire davantage sur ce point que ce que j’ai déjà fait, et ce que je fais tous les jours. » J’entendis bien qu’elle ne vouloit pas s’expliquer plus clairement. Je n’insistai donc point directement, mais je fis la même chose en satisfaisant à ce qu’elle m’avoit commandé qui étoit de lui dire ma pensée car je repris ainsi le discours : « Pour obéir, madame, à Votre Majesté, il faut que je retombe dans les prophéties que j’ai tantôt pris la liberté de lui toucher. Si les choses continuent comme elles sont, Monsieur sera dans une perpétuelle défiance que M. le prince ne se raccommodé avec Votre Majesté par le rétablissement du cardinal et il se croirai obligé par cette vue de le ménager toujours, et de se tenir avec soin dans le parlement et parmi le peuple. M. le prince, ou s’unira avec lui pour s’assurer contre ce rétablissement s’il n’y trouve pas son compte, où il partagera le royaume pour le souffrir, jusques à ce qu’il trouve plus d’intérêt à le chasser. Les particuliers qui ont quelque considération ne songeront qu’à en tirer leur avantage il y aura mille subdivisions et dans la cour et dans les factions. Voilà, madame, bien des matières pour la guerre civile et cette guerre, se mêlant à une guerre étrangère aussi grande que celle que nous avons aujourd’hui, peut porter l’État sur le penchant de sa ruine. — Si Monsieur vouloit, repartit la Reine… — Il ne voudra jamais, lui répondis-je. On trompe Votre Majesté si on le lui fait espérer, et je me perdrois