Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/374

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suré qu’il avoit dit la veille à Monsieur qu’il viendront au parlement ; qu’il aperçut à son visage qu’il eût mieux aimé qu’il n’y fût pas venu ; mais qu’il ne s’y étoit point opposé, et qu’il lui en témoigna même de la joie quand il l’alla trouver au sortir du Palais. Les effets de la foiblesse sont inconcevables, et je maintiens qu’ils sont plus prodigieux encore que ceux des passions les plus violentes : elle assemble, plus souvent qu’aucune autre passion, les contradictoires.

M. le prince retourna à Saint-Maur : Monsieur alla chez la Reine lui faire des excuses, ou plutôt lui donner des explications de la visite de M. le prince. La Reine connut bien, par l’embarras de Son Altesse Royale, que sa conduite étoit plutôt un effet de sa foiblesse que de sa mauvaise volonté. Elle en eut pitié, mais de cette sorte de pitié qui porte au mépris, et qui ramène aussitôt après à la colère. Elle ne put s’empêcher d’en faire paroître à Monsieur, même beaucoup plus qu’elle n’avoit projeté ; et elle dit le soir à madame la palatine qu’il étoit plus difficile qu’on ne croyoit de dissimuler avec ceux que l’on méprise. La Reine lui commanda en même temps de me dire de sa part qu’elle savoit que je n’en avois aucune dans ces infamies de Monsieur (ce fut son mot) ; et qu’elle ne doutoit pas que je ne lui tinsse la parole que je lui avois donnée de me déclarer contre M. le prince ouvertement, en cas qu’après l’éloignement des sous-ministres il continuât à troubler la cour. Monsieur, qui crut qu’il satisferait en quelque façon la Reine en agréant cette conduite, eut une joie extrême lorsque je lui dis que je ne me pouvois défendre