Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/406

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connoissoit du parti de M. le prince, jugea qu’au lieu de revenir à son gros et de tirer l’épée (ce que tout homme médiocrement vaillant eût fait en cette occasion), il feroit mieux d’observer et d’amuser Pesche, qui n’avoit qu’à faire un demi tour à gauche pour me donner du poignard dans les reins. Il exécuta si adroitement cette pensée, qu’en raisonnant avec lui, et en me couvrant de son long manteau, il me sauva la vie, qui étoit d’autant plus en péril que mes amis, qui me croyoient rentré dans la grand’chambre, ne songeoient qu’à pousser ceux qui étoient devant eux. Vous vous étonnerez peut-être de ce qu’ayant si bien pris mes précautions partout ailleurs, je n’avois pas garni de mes amis et le parquet des huissiers et les lanternes ; mais votre étonnement cessera quand je vous aurai dit que j’y avois fait toute la réflexion nécessaire, et que j’avois bien prévu les inconvéniens de ce manquement : mais je n’y avois point trouvé de remède, parce que le seul que j’y pouvois apporter, qui étoit de les remplir de gens affidés, étoit impraticable, ou du moins n’étoit praticable qu’en s’attirant d’autres inconvéniens encore plus grands. Presque tout ce que j’avois de gens de qualité auprès de moi avoit son emploi, et son emploi nécessaire dans les différens postes qu’il étoit important d’occuper. Il n’y eût eu rien de si odieux que de mettre des gens ou du peuple ou de bas étage dans ces sortes de lieux, où l’on ne laisse entrer dans l’ordre que des gens de condition. Si on les eût vus occupés par des gens de moindre étoffe, au préjudice d’une infinité de gens illustres que M. le prince avoit avec lui, les indifférens du parlement se fussent prévenus infailliblement contre un spectacle de