Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/412

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peu de compétence d’un gentilhomme à lui, que cinq cents hommes étoient moins à lui qu’un laquais à moi. Monsieur, qui vit que je ne donnois pas dans sa proposition, et à qui madame de Chevreuse, à laquelle il avoit envoyé Ornano pour la persuader, manda que j’avois raison ; Monsieur, dis-je, alla trouver la Reine pour lui remontrer les grands inconvéniens que la continuation de cette conduite produiroit infailliblement. Comme de son naturel elle ne craignoit rien et prévoyoit peu, elle ne fit aucun cas des remontrances de Monsieur ; et d’autant moins qu’elle eût été ravie, dans le fond, des extrémités qu’elle s’imaginoit et possibles et proches. Quand M. le chancelier qui lui parla fortement, et les Bertet et les Brachet, qui étoient accablés de tristesse et cachés dans les greniers du Palais-Royal, et qui appréhendoient d’être égorgés dans une émotion générale, lui eurent fait connoître que la perte de M. le prince et la mienne, arrivées dans une conjoncture pareille, jetteroient les choses dans une confusion que le seul nom de Mazarin pouvoit même rendre fatale à la maison royale, elle se laissa fléchir plutôt aux larmes qu’aux raisons du genre humain ; et elle consentit de donner aux uns et aux autres un ordre du Roi, par lequel il leur seroit défendu d’aller au Palais. M. le premier président, qui ne doutoit pas que M. le prince n’accepteroit point ce parti, que l’on ne pouvoit dans la vérité lui imposer avec justice, parce que sa présence y étoit nécessaire, alla chez la Reine avec le président de Nesmond. Il lui fit connoître qu’il seroit contre toute sorte d’équité de défendre à M. le prince d’assister à un lieu où il ne se trouvoit que pour demander à se jus-