Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/315

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et nous ne le pouvions avoir qu’en faisant tout ce qui étoit en notre pouvoir pour l’exaltation de Sachetti, et nous étions moralement assurés que ce que nous ferions pour Sachetti ne pourroit réussir : de sorte que la bonne conduite nous portoit à ce à quoi nous étions obligés par la bonne foi. Cette utilité n’étoit pas la seule : notre manœuvre couvroit notre marche, et nos ennemis tiroient à faux, parce qu’ils visoient à faux, et toujours où nous n’étions pas. Vous verrez le succès de cette conduite après que je vous aurai expliqué celle de Chigi, et la raison pour laquelle nous avions jeté les yeux sur lui.

Il étoit créature du pape Innocent, et le troisième de la promotion de laquelle j’avois été le premier. Il avoit été inquisiteur à Malte et nonce à Munster, et il avoit acquis en tous lieux la réputation d’une intégrité sans tache. Ses mœurs avoient été sans reproches dès son enfance. Il savoit assez d’humanités pour faire paroître au moins une teinture suffisante des autres sciences. Sa sévérité paroissoit douce, ses maximes paroissoient droites ; il se communiquoit peu, mais ce peu qu’il se communiquoit étoit mesuré et sage, (savio col silentio), mieux qu’homme que j’aie jamais connu. Tous les dehors d’une piété véritable et solide relevoient merveilleusement toutes ces qualités, ou plutôt toutes ces apparences. Ce qui leur donnoit un corps au moins fantastique étoit ce qui s’étoit passé à Munster entre Servien et lui. Celui-là, qui étoit connu et reconnu pour le démon exterminateur de la paix ; s’y étoit cruellement brouillé avec le Contarin, ambassadeur de Venise, homme sage et homme de bien. Chigi se signala pour le