Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/366

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ce qu’il ne fait pas même de plus impossible est ingratitude on dureté. Ce qui est encore pis que tout ce que je viens de vous dire, c’est que le remède qu’un véritable bon cœur veut apporter à ces inconvéniens aigrit le mal au lieu de le guérir, parce qu’il le flatte. Je m’explique. Comme j’avois toujours vécu avec mes domestiques comme avec mes frères je ne m’étois pas seulement imaginé que je pusse trouver parmi eux que de la complaisance et de la douceur. Je commençai à m’apercevoir dans la galère que la familiarité a beaucoup d’inconvéniens ; mais je crus que je pourrois remédier à cela par le bon traitement ; et le premier pas que je fis en arrivant à Florence fut de partager avec ceux qui m’avoient suivi dans mon voyage, et avec tous les autres qui m’avoient joint dans le chemin, l’argent que le grand duc m’avoit prêté. Je leur donnai à chacun six-vingt pistoles, proprement pour s’habiller et je fus très-étonné en arrivant à Rome de les trouver, au moins pour la plupart, sur le pied gauche, et dans des prétentions sur plusieurs chefs sans comparaison plus grandes qu’on ne les a dans la maison des premiers ministres. Ils trouvèrent mauvais que l’on ne tapissât pas de belles tapisseries les chambres qu’on leur avoit marquées dans mon palais. Cette circonstance n’est qu’un échantillon de cent et cent de cette nature ; et c’est tout vous dire que les choses en vinrent au point, et par leurs murmures, et par la division qui suit toujours de fort près les murmures, que je fus obligé, pour ma propre satisfaction, de faire un mémoire exact, dans le grand loisir que j’eus aux eaux de Saint-Cassien, de ce que j’avois donné à mes gentilshommes