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[1652] MÉMOIRES

angevin. M. le prince le reçut avec une joie incroyable, et embrassa plusieurs fois Soucelles, en lui disant qu’il lui apportoit la meilleure nouvelle qu’il eût reçue de sa vie, parce que sans cela ils étoient perdus. Il avoit été auparavant, de la part de M. d’Orléans, demander à plusieurs colonels chez eux, et entre autres à Favier, conseiller d’État, et à Lamoignon, maître des requêtes, qu’ils fissent armer leurs colonelles, en vertu de l’ordre de la ville ; mais ils répondirent que c’étoit un ordre forcé, auquel ils ne pouvoient obéir : et en effet ils ne firent point armer pour cela, mais pour faire des corps-de-garde dans les quartiers pour la sûreté publique. Ainsi le bagage fut sauvé : il y en avoit tant, qu’il fut près de cinq heures à marcher jusques à la plaine de Grenelle, d’où on le fit aller hors les portes Saint-Marceau et Saint-Victor, où il fut quelques jours. L’armée passa le soir, et prit la même route. Dès le matin le régiment de Languedoc et un autre ayant été défaits, et Valon, qui commandoit le premier, ayant été blessé, ils se rallièrent, et se présentèrent à la porte du Temple pour passer dans Paris, et aller gagner leur gros ; mais l’enseigne qui commandoit à la garde de la porte ayant reçu ordre de l’hôtel-de-ville de ne laisser passer personne, les refusa : sur quoi ayant été tiré sur lui (quelques-uns disent que ce fut sa propre sentinelle), il tomba mort ; de sorte qu’il n’y eut plus de résistance, et les deux régimens passèrent. Il fut tiré aussi quelques coups de fauconneaux de la Bastille sur les troupes du Roi, par ordre de Mademoiselle[1], mais sans ordre de la ville ; ce qui sauva

  1. Par ordre de Mademoiselle : Mademoiselle dit dans ses Mémoires,