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SUR CONRART.

doit avec Herminius ou Acante (Pellisson), et avec Godeau, l’évêque de Vence, qui trouvoit bon qu’on l’appelât galamment le mage de Tendre ou de Sidon. Conrart suivoit ainsi la mode, en se prêtant quelquefois à l’afféterie d’un langage précieux, que le bon goût réprouve. On le vit même, le samedi 20 décembre 1653, faire assaut de mauvais vers dans la ridicule journée des madrigaux, sur laquelle nous avons donné ailleurs quelques détails[1].

Cependant les infirmités de Conrart s’aggravoient chaque année ; il écrivoit à Félibien, au mois de janvier 1648, que, retenu par la goutte, il ne pouvoit pas même monter les degrés qui conduisoient à son cabinet[2]. Cet état de douleurs presque habituelles n’avoit pas altéré l’égalité de son caractère ; aussi Sarrasin, dans une jolie ballade, l’appeloit-il le goutteux sans pareil[3] ; et Conrart lui répondoit gaiement :

<poem> Pour moi, qui des fois plus de cent Ai passe par ceste estamine, Que me sert-il d’être innocent, Et plus net que n’est une hermine ? Puisqu’au pied je porte une espine Qui me rend tout lieu raboteux, Et que l’on dit quand je chemine : C’est pauvre chose qu’un goutteux[4].

Conrart résigna, le 20 janvier 1658, sa charge de secrétaire du Roi[5]; et il ne s’occupa plus que de travaux historiques, littéraires, ou même théologiques. Le dépérissement de sa santé contribua sans

  1. Biographie universelle de Michaud, article de mademoiselle de Scuderi, tome 41, page 391.
  2. Lettres familières de Conrart à Félibien ; Paris, 1681, page 132.
  3. Œuvres de Sarrasin ; Paris, 1685, tome 2, page 177. Ce poëte mourut en 1654.
  4. Ibid., p. 180,
  5. Tessereau, Histoire de la Chancellerie, tome 1, page 528.