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DU PÈRE BERTHOD. [1652]

Madame repartit que non, et lui demanda s’il étoit venu pour la fourber, comme il avoit déjà fait. Le duc de Lorraine lui répondit des railleries ; puis se tournant vers M. d’Orléans, qui étoit dans la chambre : « Hé bien, mon frère, nous battrons-nous ? Je suis venu pour cela ici ; les doigts m’en démangent ; » et cent autres drôleries dans lesquelles il n’épargna pas M. le prince, auquel il promit d’amener dans deux jours à Paris le maréchal de Turenne mort ou vif, après avoir défait son armée : mais qu’il prioit M. le prince de ne rien prétendre au butin ; qu’il l’avoit promis aux soldats, et qui’il ne se réservoit à lui, duc de Lorraine, que la vaisselle d’argent seulement. On vit bien que tout cela n’étoit que gaillardise ; mais la venue de son armée et celle du duc de Wirtemberg anima si fort les bons bourgeois et les médiocres, et beaucoup de petit peuple, qu’ils en conçurent une haine mortelle contre M. le prince, et en grondèrent horriblement contre M. d’Orléans. Ils étoient en colère jusqu’à tel point que si dans ce temps-là quelqu’un d’autorité de la part du Roi se fût rendu leur chef, la bourgeoisie eût pris les armes, et se fût allée joindre au maréchal de Turenne.

Quoique Paris fût dans de si belles dispositions, que le secrétaire de la négociation l’écrivît tous les jours à la cour, qu’on la pressât de venir, tout cela n’échauffoit pas ; et, dans cette conjoncture, ce retardement pensa dépiter tout le monde. Mais il falloit que l’affaire se fît : ceux qui l’avoient condamnée dans le commencement, qui l’avoient méprisée dans le milieu, avouèrent et écrivirent même aux correspondans de la cour que quoiqu’ils gâtassent tout par leurs