Aller au contenu

Page:Peyrebrune - Les femmes qui tombent, 1882.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14
les femmes qui tombent

— Nous avons dit : huit cents louis ?

Elle ne répondit pas, blessée. Cependant ses yeux suivirent, demi clos, le feuillètement des billets de banque qu’Edwards comptait.

Il fit un rouleau et, se penchant, le glissa dans le manchon.

— Voilà.

Son accent et son geste disaient : « Bonsoir. »

Elle avait brusquement retiré ses mains, comme pour ne pas recevoir l’argent ; mais, soudain, elle se jeta sur Edwards, appuya sur lui sa gorge opulente et l’étreignit.

— Tu ne m’aimes plus, disait-elle la voix basse.

Alors elle joua sa comédie de courtisane. Elle ne voulait pas être lâchée par ce banquier, qui couvrait d’or son corps de lionne amoureuse. Elle s’entendait à aguicher ce blasé, à donner soif à cet abreuvé de tous les plaisirs. C’était sa force. Si elle perdait cette sorte d’influence magnétique sur lui, elle le perdait tout entier.

Maintenant, enroulée à lui, elle l’électrisait, violente et passionnée, parce qu’il se défendait.

Elle avait jeté à terre son manteau de fourrure, un renard de trois mille écus, et, libre de ses beaux bras, qui crevaient au ras de l’épaule le satin vieil or de ses manches, elle en faisait une chaîne autour d’Edwards, l’entraînant peu à peu.

Une poussée dans la porte d’un cabinet de toilette, vaste, aux larges divans circulaires, aux ta-