§ 1. L’observateur qui, arrivant dans une région de langue irlandaise, entend pour la première fois le parler local, est tout d’abord frappé par la multiplicité des sons de ce parler.
Le consonantisme présente un nombre de variétés approximativement double de celui qu’on rencontre dans la plupart des autres langues européennes, et presque chacune de ces variétés doit être considérée comme un phonème distinct, presque toutes présentent ce triple caractère : de se laisser nettement définir par opposition aux autres variétés ; d’être sensiblement identiques chez tous les sujets en une région donnée (à part quelques phonèmes actuellement en cours de transformation, cf. § 48 sq.) ; d’apparaître indépendamment des phonèmes environnants. Aussi presque toutes ces variétés sont-elles normalement utilisées pour distinguer différents mots ou différentes formes d’un même mot.
§ 2. Le vocalisme, au premier abord, ne paraît guère moins complexe. Cependant les conditions de cette complexité sont tout autres et l’importance au point de vuedu système de la langue en est bien moindre. Les variétés vocaliques sont en effet le plus souvent mal caractérisées par opposition les unes aux autres, sujettes à des fluctuations considérables d’un sujet à l’autre, dépendantes quant à leur répartition des phonèmes environnants. Aussi la plupart des oppositions concevables entre ces diverses variétés ne peuvent-elles être utilisées pour des fins sémantiques. C’est dire que le vocalisme du parler présente, avec un jeu étendu de sons divers, un nombre restreint de phonèmes distincts.
Ce déséquilibre entre consonantisme et vocalisme domine tout le système phonétique.