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DES ALIMENTS.

de la vertu érotique des truffes.

44. — Les Romains ont connu la truffe ; mais il ne paraît pas que l’espèce française soit parvenue jusqu’à eux. Celles dont ils faisaient leurs délices leur venaient de Grèce, d’Afrique, et principalement de Lybie ; la substance en était blanche et rougeâtre, et les truffes de Libye étaient les plus recherchées, comme à la fois plus délicates et plus parfumées.


Gustus elementa per omnia quærunt. Juvénal.


Des Romains jusqu’à nous il y a eu un long interrègne, et la résurrection des truffes est assez récente, car j’ai lu plusieurs anciens dispensaires où il n’en est pas mention : on peut même dire que la génération qui s’écoule au moment où j’écris en a été presque témoin.

Vers 1780, les truffes étaient rares à Paris : on n’en trouvait, et seulement en petite quantité, qu’à l’hôtel des Américains et à l’hôtel de Provence, et une dinde truffée était un objet de luxe qu’on ne voyait qu’à la table des plus grands seigneurs ou chez les filles entretenues.

Nous devons leur multiplication aux marchands de comestibles, dont le nombre s’est fort accru, et qui, voyant que cette marchandise prenait faveur, en ont fait demander dans tout le royaume, et qui, les payant bien et les faisant arriver par les courriers de la malle et par la diligence, en ont rendu la recherche générale ; car, puisqu’on ne peut pas les planter, ce n’est qu’en les recherchant avec soin qu’on peut en augmenter la consommation.