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Je rencontrai un jour un courrier que j’avais connu à l’armée, et qui arrivait d’Espagne, où il avait été envoyé en dépêche par le gouvernement (correo ganando horas. — Esp.) ; il avait fait le voyage en douze jours, s’étant arrêté à Madrid seulement quatre heures ; quelques verres de vin et quelques tasses de bouillon, voilà tout ce qu’il avait pris pendant cette longue suite de secousses et d’insomnie ; et il ajoutait que des aliments plus solides l’eussent infailliblement mis dans l’impossibilité de continuer sa route.

sur les rêves.

96. — La diète n’a pas une moindre influence sur le sommeil et sur les rêves.

Celui qui a besoin de manger ne peut pas dormir ; les angoisses de son estomac le tiennent dans un réveil douloureux, et si la faiblesse et l’épuisement le forcent à s’assoupir, ce sommeil est léger, inquiet, et interrompu.

Celui qui, au contraire, a passé dans son repas les bornes de la discrétion, tombe immédiatement dans le sommeil absolu : s’il a rêvé, il ne lui reste aucun souvenir, parce que le fluide nerveux s’est croisé en tous sens dans les canaux sensitifs. Par la même raison son réveil est brusque : il revient avec peine à la vie sociale ; et quand le sommeil est tout à fait dissipé, il se ressent encore longtemps des fatigues de la digestion.

On peut donc donner comme maxime générale que le café repousse le sommeil. L’habitude affaiblit et fait même totalement disparaître cet inconvénient : mais il a infailliblement lieu chez tous les Européens quand ils commencent à en prendre. Quelques ali-