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lequel il reposait au moment de rendre le dernier soupir.

Les recueils sont pleins d’exemples d’obésité monstrueuse ; je les y laisse pour parler en peu de mots de ceux que j’ai moi-même recueillis.

M. Rameau, mon condisciple, maire de la Chaleur, en Bourgogne, n’avait que cinq pieds deux pouces, et pesait cinq cents.

M. le duc de Luynes, à côté duquel j’ai souvent siégé, était devenu énorme ; la graisse avait désorganisé sa belle figure, et il passa les dernières années de sa vie dans une somnolence presque habituelle.

Mais ce que j’ai vu de plus extraordinaire en ce genre était un habitant de New-Yorck, que bien des Français encore existants à Paris peuvent avoir vu dans la rue de Broadway, assis sur un énorme fauteuil dont les jambes auraient pu porter une église.

Édouard avait au moins cinq pieds dix pouces, mesure de France, et comme la graisse l’avait gonflé en tout sens, il avait au moins huit pieds de circonférence. Ses doigts étaient comme ceux de cet empereur romain à qui les colliers de sa femme servaient d’anneaux : ses bras et ses cuisses étaient tubulés, de la grosseur d’un homme de moyenne stature, et il avait les pieds comme un éléphant, couverts par l’augmentation de ses jambes ; le poids de la graisse avait entraîné et fait bâiller la paupière inférieure ; mais ce qui le rendait hideux à voir, c’étaient trois mentons en sphéroïdes qui lui pendaient sur la poitrine dans la longueur de plus d’un pied, de sorte que sa figure paraissait être le chapiteau d’une colonne torse.

Dans cet état, Édouard passait sa vie assis près de la fenêtre d’une salle basse qui donnait sur la rue, et buvant de temps en temps un verre d’ale, dont un pitcher de grande capacité était toujours auprès de lui.