Page:Physiologie du gout, ou meditations de gastronomie transcendante; ouvrage théorique, historique, et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes Parisiens (IA b21525699).pdf/313

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

carte à payer[1] la note de la quantité des mets fournis et de leur prix.

Parmi ceux qui accourent en foule chez les restaurateurs, il en est peu qui se doutent qu’il est impossible que celui qui créa le restaurant ne fût pas un homme de génie et un observateur profond.

Nous allons aider la paresse, et suivre la filiation des idées dont la succession dut amener cet établissement si usuel et si commode.

établissement.

138. — Vers 1770, après les jours glorieux de Louis XIV, les roueries de la régence et la longue tranquillité du ministère du cardinal de Fleury, les étrangers n’avaient encore à Paris que bien peu de ressources sous le rapport de la bonne chère.

Ils étaient forcés d’avoir recours à la cuisine des aubergistes, qui était généralement mauvaise. Il existait quelques hôtels avec table d’hôte, qui, à peu d’exceptions près, n’offraient que le strict nécessaire, et qui d’ailleurs avaient une heure fixe.

On avait bien la ressource des traiteurs ; mais ils ne livraient que des pièces entières, et celui qui voulait régaler quelques amis était forcé de commander à l’avance, de sorte que ceux qui n’avaient pas le bonheur d’être invités dans quelque maison opulente, quittaient la grande ville sans connaître les ressources et les délices de la cuisine parisienne.

Un ordre de choses qui blessait des intérêts si jour-

  1. Ce mot, carte à payer, usité à l’origine même des restaurants, a été remplacé d’abord par celui de carte, puis par celui d’addition, qui est d’usage aujourd’hui (1853).