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ches inférieures, inclinées en parasol, paraissaient devoir le garantir.

Asile funeste ! la pointe de l’arbre allait chercher le fluide électrique jusque dans les nuages, et la pluie, en tombant le long des branches, lui servait de conducteur. Bientôt une détonation effroyable se fit entendre, et l’infortuné promeneur tomba mort sans avoir le temps de pousser un soupir.

Enlevé ainsi par le genre de mort que désirait César, et sur lequel il n’y avait pas moyen de gloser, M. de Borose fut enterré avec les cérémonies du rituel le plus complet. Son convoi fut suivi jusqu’au cimetière du Père-Lachaise par une foule de gens à pied et en voiture ; son éloge était dans toutes les bouches, et quand une voix amie prononça sur sa tombe une allocution touchante, il y eut écho dans le cœur de tous les assistants.

Herminie fut atterrée d’un malheur si grand et si inattendu ; elle n’eut pas de convulsions, elle n’eut pas de crises de nerfs, elle n’alla pas cacher sa douleur dans son lit ; mais elle pleura son père avec tant d’abandon, de continuité et d’amertume, que ses amis espérèrent que l’excès de sa douleur en deviendrait le remède, car nous ne sommes pas assez fortement trempés pour éprouver pendant longtemps un sentiment si vif.

Le temps a donc fait sur ce jeune cœur son effet immanquable : Herminie peut nommer son père sans fondre en larmes ; mais elle en parle avec une piété si douce, un regret si ingénu, un amour si actuel et un accent si profond, qu’il est impossible de l’entendre et de ne pas partager son attendrissement.

Heureux celui à qui Herminie donnera le droit de l’accompagner et de porter avec elle une couronne funéraire sur la tombe de leur père !