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anthologie

ne savante ayant établi péremptoirement à la suite de l’hygiène empirique que les muscles et le cerveau, loin de s’opposer, s’équilibrent par l’exercice alternatif. Moralement, il n’en a jamais eu. Il était directement contraire à l’Évangile, mais il n’en est que plus instructif de constater comment le christianisme a dû s’en accoutumer et vivre avec lui sans oser le condamner par la suite, comme il l’avait fait au temps de la primitive Église. N’empêche que si l’on remonte le cours des âges, c’est à un chrétien, à l’un des plus grands qui aient vécu, à saint Benoît de Nursie, fondateur des Bénédictins, qu’il faut se reporter pour trouver la formule applicable à l’époque présente. En obligeant ses moines à manier l’outil, une partie du jour, et à mener le travail des bras concurremment avec celui de l’esprit, saint Benoît visait à préparer une élite de « régénérateurs de la vie ». Quatorze siècles ont passé ; la recette demeure la même. Mais c’est à tout le monde, maintenant, que doit s’appliquer le précepte donné par le célèbre religieux. On parle de « service civil » et, ce terme étant vague, beaucoup s’en emparent, comme d’un thème à paraphraser. Soyons plus nets et plus francs. C’est « service ouvrier » qu’il faut dire. Entendons par là le stage obligatoire à l’atelier, à l’usine, au chantier : stage dont la durée et les modalités peuvent varier selon les besoins de la communauté, mais dont le principe doit demeurer aussi immuable que celui du service militaire.

« Où va l’Europe ? », 1923.