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le roman d’un rallié

divers. Une seule chose le troublait et le contrariait. Il devinait dans cet homme un fond de sécheresse, des convictions plus raisonnées que senties, une chaleur un peu factice, un certain scepticisme inavoué. Mais cela même l’attirait. Que ne ferait-on pas, songeait-il, avec des dons pareils et de l’enthousiasme en plus ?

Quand Vilaret venait à Kerarvro, ce qui n’était point fréquent, il laissait sa voiture au village et gagnait le château à pied par la forêt. Ce jour-là — on touchait à la fin de Janvier — la neige couvrait la terre ; sous son grand manteau blanc, la nature avait cet aspect apaisé qui suit les tempêtes d’hiver. Le ciel éclairci prenait des teintes infiniment tendres ; vers le sud, fuyaient les dernières nuées, épaisses masses grises dont le soleil, déjà près de l’horizon, cuivrait bizarrement les contours. La température baissait. Un peu de givre commençait à briller sur les troncs d’arbres, tout éclaboussés de neige du côté où le vent avait soufflé. Sur tout cela régnait un divin silence, le calme absolu de la mort. Vilaret jouissait de ce spectacle, non en poète mais en