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LES ÉTATS-GÉNÉRAUX VOTENT LA SÉPARATION

Bruxelles par le prince Frédéric. Manifestement, ce n’était point des États mais de ses troupes qu’il attendait la réponse au discours du trône. Les fusillades du Parc en décidèrent et les États ne firent que ratifier la victoire des « émeutiers » dont le roi, quelques jours auparavant, parlait de si haut, quand, le 29 septembre, ils se prononcèrent par 55 voix contre 43 pour la séparation des deux parties de l’État. Les députés belges poussèrent le scrupule jusqu’à prendre part à ce vote. À la date où il fut émis il n’était plus qu’une formalité vide de sens, la dernière manifestation d’une assemblée expirante. Le royaume des Pays-Bas avait vécu. La compétence des États-Généraux ne s’étendait plus en fait qu’à la Hollande.

Leur convocation avait hâté la rupture qu’elle devait éviter. L’espoir même qu’elle inspirait aux modérés et aux timides avait poussé aux extrêmes, chez les avancés, l’impatience d’en finir et de couper les ponts. Les réticences et l’ambiguïté du discours du trône, dont le texte fut connu à Bruxelles dans la soirée du 14 septembre, avaient renforcé leur influence et découragé leurs adversaires. Que pouvaient-ils répondre encore à ceux qui accusaient le roi de tromper l’opinion et de préparer la guerre, et le prince d’Orange d’avoir menti en se portant fort des intentions de son père ? Le soir même, au milieu d’un banquet offert aux officiers des volontaires liégeois, Rogier faisait crier aux armes. Au dehors, la foule s’ameutait ; on brûlait le discours royal et il fallut que la garde bourgeoise déblayât les abords de l’hôtel de ville où la Commission de sûreté siégeait en permanence.

Les troubles s’aggravèrent le lendemain. Les Liégeois, suivis par des bandes d’étrangers auxquels s’adjoignent les démocrates de Bruxelles conduits par l’avocat Ducpétiaux, exigent la constitution d’un gouvernement provisoire. Le club de la salle Saint-Georges vote une adresse aux députés, les sommant de quitter les États-Généraux si la séparation n’est pas immédiatement décidée. L’anarchie commence à s’emparer de la ville livrée aux auxiliaires qui continuent à y affluer du dehors. Les impôts ne rentrant plus, la caisse communale est vide et