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L’ATTAQUE DE BRUXELLES

toire. Partout ailleurs l’échec des troupes fut si rapide qu’il désorganisa complètement l’ensemble des opérations[1]. À la porte de Flandre, la cavalerie s’est à peine engagée entre les maisons, qu’elle recule en désordre sous la fusillade, les pavés, les meubles, la chaux vive qui s’abattent sur elle du haut des fenêtres. Même échec à la porte de Laeken, où les troupes cèdent au premier abord. À la porte de Louvain, les soldats, après s’être avancés jusqu’à la hauteur du palais des États-Généraux, se heurtent à une barricade et s’arrêtent.

Au début, les choses avaient mieux tourné à la porte de Schaerbeek. Après en avoir démoli à coups de canon les défenses improvisées, les régiments dirigés par Constant Rebecque s’élancent au pas de charge vers la Place Royale. Une fusillade terrible brise bientôt leur élan. Constant Rebecque est blessé ; surpris, les officiers hésitent et se troublent. Impossible de s’arrêter pour répondre au feu des tirailleurs postés dans les maisons. Et voici que du bout de la rue le feu de la barricade construite devant la Place Royale s’ajoute en front à celui qui de côté tombe des fenêtres sur les assaillants. Ils sont arrivés à la hauteur du Parc ; l’abri tentateur de ses grands arbres est irrésistible et, tournant brusquement à gauche, ils s’y précipitent et s’y entassent : l’attaque est rompue. Bien plus, son succès est désormais impossible. La supériorité numérique des Hollandais était si écrasante qu’ils eussent sans doute emporté la barricade s’ils en avaient tenté l’assaut. En se réfugiant dans le Parc, ils perdaient l’avantage du nombre. Pour risquer de nouveaux efforts, il leur faudrait défiler par les ouvertures des grilles sous les coups de fusil et se laisser décimer en détail. Vainement ils exécutèrent quelques sorties, vainement aussi ils tentèrent de prendre à revers la barricade de la Place Royale, en cheminant par le palais et l’hôtel de Belle-Vue. Le soir venu, ils purent se convaincre qu’ils ne passeraient pas. « L’affaire est manquée », écrit Constant Rebecque.

Visiblement, l’armée s’est engagée dans un guêpier, et le

  1. L’effectif des colonnes d’attaque se montait à 8.900 hommes, dont 4.700 furent dirigés sur la porte de Schaerbeek.