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Au moment où meurt Charles IV, le royaume jouit donc d’une tranquillité profonde. L’extinction même de la dynastie capétienne ne soulève aucune difficulté. Déjà, au décès de Louis X, sa fille avait été écartée de la couronne et, en montant sur le trône, Philippe de Valois ne faisait donc que profiter d’un principe proclamé douze ans plus tôt, conforme à l’ancien droit royal franc, admis sans conteste par toute la nation et si évidemment inattaquable qu’Édouard III, petit-fils par sa mère de Philippe le Bel, ne fit entendre au moment décisif aucune protestation. Même en ligne féminine ses droits étaient au surplus primés par ceux de Jeanne, fille de Louis X, épouse de Philippe d’Evreux, à laquelle le nouveau roi, par mesure de prudence, céda le royaume de Navarre, auquel ne s’appliquait pas aussi évidemment qu’à celui de France, la soi-disant « loi salique ».

Son règne s’ouvrit sous d’heureux auspices. Appelé à l’aide par le comte de Flandre contre le grand soulèvement des tisserands bourgeois et des paysans de la Flandre maritime qui, depuis 1325, avaient uni leurs efforts, ceux-ci contre la noblesse, ceux-là contre les patriciens, le roi remportait à Cassel, le 23 août 1328, une victoire qui mit fin à la révolte. L’année suivante, Édouard III lui prêtait serment de vassalité pour la Guyenne. Une guerre paraissait si peu probable que le roi préparait, d’accord avec le pape, une Croisade ou, pour mieux dire, une expédition française en Orient qui devait mettre à la voile en 1332.

Édouard III avait eu en Angleterre de moins heureux commencements. De nouveaux succès militaires des Écossais l’avaient forcé à reconnaître (1328) l’indépendance de leur pays, et leur roi Robert Bruce, rompait ainsi le lien de vassalité auquel Édouard Ier avait soumis ces tenaces adversaires. Heureusement pour lui, la révolte d’Édouard Baliol contre David Bruce, successeur de Robert (1331), lui permit de rétablir ce qu’il venait de défaire. Il se prononça pour Baliol, battit les troupes du roi légitime à Hallisdown Hill (1333) et le força à se réfugier en France où Philippe VI l’accueillit comme Louis XIV devait plus tard accueillir Jacques Stuart. Baliol s’empressa d’assurer sa situation en cédant au vainqueur le pays de Berwick et en reconnaissant la suzeraineté de l’Angleterre sur le royaume qu’elle lui avait procuré (février 1334).

La sympathie montrée à David Bruce par la cour de France fut ressentie par Édouard III comme un outrage. Il y répondit en