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Naples qui devait depuis lors jusqu’aux Temps Modernes n’être plus qu’une possession espagnole. Il ne conserva pas Milan beaucoup plus longtemps. Le pape Jules II unissait contre lui en 1511 Venise, Ferdinand, puis bientôt après Maximilien et Henri VIII d’Angleterre. Louis dut quitter l’Italie pour courir au nord tenir tête aux Anglais qui, après l’avoir battu à Guinegat, se rembarquèrent, mécontents de Maximilien et faisant la paix.

A les envisager dans l’ensemble de l’histoire de France, les expéditions de Charles VIII et de Louis XII en Italie apparaissent comme de simples hors-d’œuvre. Elles ne se rattachent à aucune nécessité nationale. Provoquées uniquement par l’ambition dynastique, ce furent des «guerres de magnificence », c’est-à-dire des guerres inutiles. Elles contribuèrent sans doute à accélérer dans le royaume le goût et la passion de la Renaissance. Mais la politique qu’elles inaugurèrent, et qui ne devait être décidément abandonnée que sous Henri II (Paix de Cateau Cambrésis), n’aboutit qu’à un vain gaspillage d’hommes et de finances. Leur seul résultat durable fut d’orienter l’Espagne vers l’Italie et, par une conséquence inévitable, de la rapprocher de la maison de Habsbourg.

Il était évident, en effet, qu’entre Maximilien luttant contre la France dans les Pays-Bas, et les rois catholiques luttant contre elle dans le royaume de Naples, l’alliance politique et sa suite obligée, l’alliance dynastique, allaient s’imposer à bref délai. Dès 1496, le double mariage de don Juan, l’héritier de Ferdinand et d’Isabelle, avec Marguerite, fille de Maximilien, et de Philippe le Beau, son fils, avec l’infante Jeanne, attachait étroitement les deux familles. Rien ne pouvait faire prévoir en ce moment que leurs héritages dussent jamais se confondre en un seul. Mais une fois de plus la nature travailla pour les Habsbourg. La mort faucha le chemin devant eux. Les décès successifs de don Juan (1497), de sa sœur aînée Isabelle (1498) et du fils de celle-ci, don Miguel (1500), appelèrent Jeanne et Philippe le Beau à recueillir la succession des royaumes espagnols. Six ans plus tard, Philippe était enlevé inopinément par une fluxion de poitrine, léguant ses droits à son fils Charles, à peine âgé de sept ans. Ferdinand vécut assez longtemps pour épargner au frère orphelin le danger de lui succéder avant d’être sorti de l’enfance. Quand le vieux roi mourut en 1516, son petit-fils venait d’être proclamé majeur.

Charles-Quint est un des très rares personnages depuis l’Antiquité dont le nom jouit d’une audience universelle. Il s’en faut de