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comporter un danger latent : l’esprit de système développé jusqu’à la partialité qui pourrait arriver à faire perdre de vue le véritable sens des idées physiques sur l’univers et à faire dégénérer cette science en un vain formalisme. Supposons, en effet, tout lien rompu avec la réalité : une loi physique n’est plus une relation entre grandeurs qui sont mesurées indépendamment les unes des autres, ce n’est plus qu’une définition en vertu de laquelle une de ces grandeurs est ramenée à l’ensemble des autres. Cette transformation du caractère des lois physiques est certes très tentante, car il est beaucoup plus précis de définir une grandeur physique par une équation que par une mesure ; il n’en est pas moins vrai qu’elle suppose que l’on renonce à donner une signification propre à cette grandeur. D’autre part, il y a aussi cette circonstance aggravante que, dans le cas où cette grandeur conserve son ancien nom, cela peut facilement être la source de confusions et de malentendus.

Nous voyons comment des esprits divers travaillent à l’édification de l’univers des physiciens et comment les points de vue auxquels ils se placent sont différents. Leurs efforts tendent, tantôt à rattacher ensemble les phénomènes du monde physique, tantôt à les mettre en dépendance de lois dont la cause est dans le monde réel. Suivant les époques, l’une ou l’autre des deux tendances sera prépondérante.

Aux époques où le système physique de l’univers a un certain caractère de stabilité (ce fut le cas dans la seconde moitié du siècle dernier), c’est la tendance métaphysique qui prévaut ; on se croit alors relativement près de pénétrer la constitution du monde réel. Par contre aux époques où, comme de notre temps, tout est en voie de transformation et paraît incertain, on est plus généralement favorable au positivisme. Le savant consciencieux se sent, en effet, davantage porté à revenir au seul point de départ solide : les phénomènes du monde sensible.

Faisons maintenant l’historique des différents systèmes de l’univers et voyons comment ils se sont transformés les uns dans les autres, en tâchant de faire sortir le trait caractéristique de cette évolution.

Deux faits nous apparaissent particulièrement significa-