Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, IX et X.djvu/143

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cadavre d’Hector autour du monument de Patrocle[1], ni égorgé et fait brûler sur le bûcher de son ami des captifs troyens[2]. Nous soutiendrons que tous ces faits sont faux et nous ne souffrirons pas qu’on fasse croire à nos guerriers qu’Achille, le fils d’une déesse et du sage Pélée, qui lui-même était né d’un fils de Jupiter[3], l’élève du vertueux Chiron ait eu l’ame assez désordonnée pour réunir en elle deux vices contraires, la grossièreté jointe à la cupidité, avec un mépris superbe des dieux et des hommes.

Tu as raison.

Gardons-nous aussi de croire et de laisser dire que Thésée, fils de Neptune, et Pirithoüs, fils de Jupiter, ont tenté des enlèvemens aussi criminels[4], ni que nul enfant des dieux, nul héros ait osé commettre les cruautés et les impiétés que des fictions calomnieuses leur prêtent aujourd’hui. Mettons les poètes dans l’alternative de ne plus leur imputer ces faits ou de ne plus les reconnaître comme enfans des dieux, et qu’ils

  1. Iliade, XXII, 394 et suiv.
  2. Iliade, XXIII, 175 et suiv.
  3. Pélée était fils d’Éaque, et par conséquent petit-fils de Jupiter. Iliade, XXI, v. 188.
  4. Sur l’enlèvement de Proserpine, par Pirithoüs et Thésée, voyez Isocrate, Éloge d’Hélène ; Diodore de Sicile, IV ; Properce, II, 1, v. 37 ; Ovide, Tristes, I, 5, v. 19.