Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, IX et X.djvu/157

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celui que tu choisis plaît infiniment aux enfans, à leurs maîtres et au peuple.

Je conviens qu’il est très agréable.

Tu diras peut-être qu’il ne s’accorde pas avec le plan de notre État, parce qu’il n’y a point chez nous d’homme qui réunisse les talens de deux ou de plusieurs hommes, et que chacun n’y fait qu’une seule chose.

Sans doute.

Voilà pourquoi c’est une chose particulière à notre État, que le cordonnier y est simplement cordonnier, et non pas outre cela pilote ; le laboureur, laboureur, et non pas en même temps juge ; le guerrier, guerrier et non pas encore commerçant, et ainsi des autres.

Il est vrai.

Si jamais un homme habile dans l’art de prendre divers rôles et de se prêter à toutes sortes d’imitation, venait dans notre État et voulait nous faire entendre ses poèmes, nous lui rendrions hommage comme à un être sacré, merveilleux, plein de charmes, mais nous lui dirions qu’il n’y a pas d’homme comme lui dans notre État, et qu’il ne peut y en avoir ; et nous le congédierions après avoir répandu des parfums sur sa tête et l’avoir couronné de bandelettes[1], et nous

  1. Il est douteux qu’il soit ici question d’Homère.