Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/330

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poison, s’approcha, et après avoir examiné quelque temps ses pieds et ses jambes, il lui serra le pied fortement, et lui demanda s’il le sentait ; il dit que non. Il lui serra ensuite les jambes ; et, portant ses mains plus haut, il nous fit voir que le corps se glaçait et se raidissait ; et, le touchant lui-même, il nous dit que, dès que le froid gagnerait le cœur, alors Socrate nous quitterait. Déjà tout le bas-ventre était glacé. Alors se découvrant, car il était couvert : Criton, dit-il, et ce furent ses dernières paroles, nous devons un coq à Esculape[1] ; n’oublie pas d’acquitter cette dette.

Cela sera fait, répondit Criton ; mais vois si tu as encore quelque chose à nous dire.

Il ne répondit rien, et un peu de temps après il fit un mouvement convulsif ; alors l’homme le découvrit tout-à-fait : ses regards étaient fixes. Criton, s’en étant aperçu, lui ferma la bouche et les yeux.

Voilà, Échécratès, quelle fut la fin de notre ami, de l’homme, nous pouvons le dire, le meilleur des hommes de ce temps que nous avons connus, le plus sage et le plus juste de tous les hommes.


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  1. En reconnaissance de sa guérison de la maladie de la vie actuelle.