Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/449

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

THÉÉTÈTE.

Il y a apparence.

SOCRATE.

Au nom des Grâces, Théétète, Protagoras n’était-il pas un très habile homme, qui ne nous a montré sa pensée qu’énigmatiquement, à nous autres gens du commun, au lieu qu’il a révélé la vérité toute entière à ses disciples ?

THÉÉTÈTE.

Qu’entends-tu par là, Socrate ?

SOCRATE.

Je vais te le dire : il s’agit d’une opinion qui n’est pas de médiocre conséquence. Il prétend qu’aucune chose n’est absolument, et qu’on ne peut attribuer à quoi que ce soit avec raison aucune dénomination, aucune qualité ; que si on appelle une chose grande, elle paraîtra petite ; pesante, elle paraîtra légère, et ainsi du reste ; parce que rien n’est un, ni tel, ni affecté d’une certaine qualité ; mais que du mouvement réciproque et du mélange de toutes choses se forme tout ce que nous disons exister, nous servant en cela d’une expression impropre ; car rien n’est, mais tout se fait. Tous les sages, à l’exception de Parménide, s’accordent sur ce point, Protagoras, Héraclide, Empédocle ; les plus excellents poètes dans l’un et l’autre genre de poé-