Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/478

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prix[1], et nous des ignorans condamnés à aller à son école, chacun étant à soi-même la mesure de sa propre sagesse ? Peut-on ne pas dire que Protagoras n’a parlé de la sorte que pour se moquer ? Je me tais sur ce qui me regarde, et sur mon talent de faire accoucher les esprits : dans son système, ce talent est souverainement ridicule ; aussi bien, ce me semble, que tout l’art de la dialectique. Car, n’est-ce pas une extravagance insigne d’entreprendre d’examiner et de réfuter réciproquement ses idées et ses opinions, tandis qu’elles sont toutes vraies pour chacun, si la vérité de Protagoras est bien la vérité, et si ce n’est pas en badinant que du sanctuaire de son livre elle nous a dicté ses oracles ?

THÉODORE.

Socrate, Protagoras est mon ami ; tu viens de le dire toi-même. Je ne puis donc consentir, ni à le voir réfuter ici par mes propres aveux, ni à le défendre vis-à-vis de toi contre ma pensée. Reprends donc la dispute avec Théétète, d’autant plus qu’il m’a paru t’écouter tout-à-l’heure fort attentivement.

SOCRATE.

Cependant, Théodore, si tu allais à Lacédé-

  1. Protagoras mit le premier à ses leçons le prix de cent mines. Diog. Laerc. IX, 52. — Voyez le Ménon.