Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/487

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pris une chose et en conserve le souvenir, ne la sait pas ; et après avoir montré que, quand on a vu une chose et qu’on ferme ensuite les yeux, on s’en souvient quoiqu’on ne la voie plus, nous avons prouvé qu’il en résulte que le même homme ne sait pas ce dont il se souvient ; ce qui est impossible. Voilà comme nous avons réfuté le système de Protagoras, et en même temps le tien, qui fait de la science et de la sensation une même chose.

THÉÉTÈTE.

J’en conviens.

SOCRATE.

Il n’en serait pas ainsi, mon cher ami, si le père du premier système vivait encore ; il ne serait pas embarrassé pour le défendre. Aujourd’hui que ce système est orphelin, nous l’insultons. Les tuteurs que Protagoras lui a laissés, du nombre desquels est Théodore, refusent de prendre sa défense ; et je vois bien que, dans l’intérêt de la justice, nous serons obligés de venir nous-mêmes à son secours.

THÉODORE.

Ce n’est pas moi, Socrate, qui suis le tuteur des opinions de Protagoras, mais plutôt Callias fils d’Hipponicus[1]. Pour moi, j’ai passé trop vite

  1. Voyez l’Apologie, le Cratyle et le Protagoras.