Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, VII et VIII.djvu/801

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par des paroles ou des traitemens outrageans, on poursuit le dessein de se venger, et que, quelque temps après, on tue avec une volonté délibérée celui qui nous a fait injure, sans témoigner ensuite aucun repentir de son action. Ainsi il faut distinguer deux espèces de meurtre, qui ont toutes deux la colère pour principe, et qu'on peut dire avec raison tenir le milieu entre le volontaire et l'involontaire ; ou plutôt elles n'en ont l'une et l'autre que l'apparence. Celui qui garde son ressentiment, et ne se venge pas sur-le-champ, mais attend pour le faire une occasion où il prend son ennemi au dépourvu, tient beaucoup du meurtrier volontaire ; et celui qui ne contient pas sa colère, et la satisfait à l'instant même sans aucun dessein prémédité, ressemble à l'homicide involontaire : cependant son action n'est pas tout-à-fait involontaire, mais elle n'en a que l'apparence. C'est pour cette raison qu'il est difficile de décider si les meurtres qui sont un effet de la colère sont tous volontaires, ou si le législateur doit en ranger quelques uns parmi les involontaires. Le meilleur et le plus vrai est de dire qu'ils ont en apparence ces deux caractères et de les distinguer par le dessein prémédité et par le défaut de délibération antérieure ; décernant de plus grandes peines contre ceux qui tuent par colère et