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PROTAGORAS

entraîne peu de risques. Mais pour la science, ce n’est pas dans un vase qu’on l’emporte : il faut absolument, le prix une fois payé, la recevoir en soi-même, la mettre dans son âme, et, quand on s’en va, le bien ou le mal est déjà fait.

Examinons donc la question, non pas seuls, mais avec des conseillers plus âgés ; car nous sommes encore trop jeunes pour résoudre de si graves problèmes. Pour l’instant, achevons ce que nous avons commencé de faire : allons entendre le personnage ; après cela, nous en causerons avec d’autres ; car Protagoras n’est pas seul ici : Hippias d’Élis s’y trouve également, et aussi, je crois, Prodicos de Céos, sans compter beaucoup d’autres doctes. »


Arrivée à la maison de Callias : le portier.

Ayant ainsi décidé, nous nous mîmes en route. À la porte de la maison, nous fîmes une courte halte pour achever un propos commencé au long du chemin : désireux de l’épuiser avant d’entrer, nous restâmes quelques instants dans l’avant-cour à discuter, jusqu’au moment où nous fûmes d’accord. Je crois que le portier, un eunuque, nous entendait, et il est fort possible que l’affluence des sophistes l’indispose contre les visiteurs : en tout cas, quand nous eûmes frappé à la porte et que, l’entr’ouvrant, il nous aperçut : « Ah ! dit-il, des sophistes ! Il n’est pas libre. » — Et en même temps, poussant la porte des deux mains, il la referma de toutes ses forces. Nous frappâmes de nouveau ; mais lui, sans ouvrir, nous répondit : « Voyons, vous autres, vous ne m’avez donc pas entendu ? Je vous dis qu’il n’est pas libre. » — « Mon ami, repris-je, ce n’est pas Callias que nous demandons, et nous ne sommes pas des sophistes. Rassure-toi : c’est pour Protagoras que nous venons. Annonce-nous donc. » Enfin, non sans peine, l’homme consentit à nous ouvrir.


Le vestibule ; la réunion des sophistes.

En entrant, nous trouvâmes Protagoras en train de se promener dans le vestibule. Il était escorté dans sa promenade d’un côté par Callias, fils d’Hipponicos, par le frère de Callias, né de la même mère[1], Paralos, fils de Périclès,

  1. La femme de Périclès avait été d’abord mariée à Hipponicos : Périclès en eut les deux fils nommés ici. — Sur Charmide, voir t. II,