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PHÉDON

étant vrai, et quand il s’agit de cause, et quand il s’agit de n’importe quoi ; tout ce en quoi au contraire manque cette consonance, je tiens que ce n’est point vrai. Mais j’ai envie de t’exposer plus clairement ce que je viens de dire, car pour l’instant, si je ne me trompe, tu ne comprends pas. — Non, par Zeus, dit Cébès, pas très fort ! — Et pourtant, reprit Socrate, ce b langage n’est pas du tout nouveau ; mais, en toute autre occasion aussi bien que dans l’argumentation passée, c’est celui que pas une fois je n’ai cessé de tenir. Dès que j’en viens à essayer de t’exposer quelle est l’espèce de causalité pour laquelle je me donnai toute cette peine, voici en effet que derechef je vais retrouver ce que, vous le savez, j’ai cent fois ressassé ; voici que cela me sert de point de départ et de base, quand j’admets qu’il existe un Beau en soi et par soi, un Bon, un Grand, et ainsi de tout le reste. Si tu m’accordes l’existence de ces choses, si tu en conviens avec moi, j’ai espoir qu’elles me mèneront à mettre sous tes yeux la cause, ainsi découverte, qui fait que l’âme a l’immortalité. — Mais bien sûr c que je te l’accorde, dit Cébès, et tu n’auras, toi, qu’à achever au plus vite !

— Examine donc, continua Socrate, ce qui suit de l’existence des susdites réalités, pour voir si là-dessus tu partages mon sentiment. Il est en effet pour moi évident que, si la beauté appartient à quelque chose encore hors du Beau en soi, il n’y a absolument aucune autre raison que cette chose soit belle, sinon qu’elle participe au Beau dont il s’agit. Et pour tout j’en dis autant. Est-ce là une sorte de cause qui ait ton assentiment ? — Elle a, dit-il, mon assentiment. — Dans ces conditions, repartit Socrate, les autres causes, celles qui sont savantes, je ne les comprends plus, je ne réussis pas davantage à me les expliquer : oui, qu’on me donne pour raison de la beauté de telle chose, ou l’éclat de sa couleur, d ou sa forme, ou quoi que ce soit encore d’analogue, autant d’explications auxquelles je dis bonsoir, pareillement troublé d’ailleurs en toutes ! Cette raison-ci au contraire, avec une simplicité naïve, sotte peut-être, moi j’en fais mon affaire, me disant que la beauté de cette chose n’est produite par rien d’autre sinon, ou par une présence du Beau en question, ou encore une communication, soit enfin par tels voies et moyens que comporte cette corrélation. Sur ce dernier point en effet je ne prends point jusqu’à présent fermement