lande aussi la tête de cet homme-là, cette tête extraordinaire ! Qu’il ne me reproche pas de t’avoir, toi, enguirlandé, et pour lui, pour lui qui en éloquence a la victoire sur tout le monde (et non pas seulement avant-hier comme toi, mais en tout temps), de n’avoir pas après cela de guirlandes à lui offrir !” Ce disant, il prend des bandelettes, il en fait à Socrate une guirlande, et finalement il s’allonge sur le lit. Une fois allongé, il reprend : “Allons, Messieurs ! Qu’est-ce à dire ? Vous me faites, ma foi, l’effet d’avoir toute votre tête ! Il ne faut pas vous laisser aller comme cela ; non ! mais il faut boire : c’est, vous le savez, ce qui a été convenu entre nous. Donc, pour présider à la beuverie jusqu’à temps que vous buviez vous-mêmes convenablement, c’est moi en personne que je choisis[1] ! Agathon, qu’on m’apporte, s’il y en a, une grande coupe… Mais non, ce n’est point du tout la peine : tu n’as, esclave, qu’à m’apporter, dit-il, ce seau à glace !” 214 Il en avait aperçu un, dont la capacité était de plus de huit cotyles[2]. Quand on le lui eut rempli, il commença par le vider à fond ; puis ce fut pour Socrate qu’il donna ordre de verser. Et en même temps : “À l’égard de Socrate, dit-il, je n’y mets aucune malice ; car, autant on lui demandera d’en boire, autant il en videra, et il n’en sera jamais plus ivre[3] !”
« Voilà donc que l’esclave verse, et Socrate se met à boire. Sur ce Éryximaque : “Ainsi, quelle façon de faire, dit-il, est-ce là pour nous y Alcibiade ? Alors, comme cela, le verre en main, nous ne parlons pas de quelque chose ? b nous ne chantons pas de chanson ? Nous sommes là, tout bêtement, à boire comme les gens qui ont soif ? — Éryximaque, fils excellent d’un père excellent et très sage[4], répondit Alcibiade, je te souhaite le bonsoir ! — Et moi de même ! dit Éryxi-
- ↑ La convention est qu’on boira avec un homme déjà ivre (213 a). Or ils ne sont pas encore à l’unisson. C’est donc lui qui va les y mettre en s’arrogeant la présidence du symposion (cf. p. xiii sq.).
- ↑ C’est-à-dire plus de deux litres et un quart.
- ↑ Cf. 176 c et, dans le discours d’Alcibiade, 220 a.
- ↑ Boire pour boire, sans soif, mais comme si l’on avait soif, rien de plus contraire aux principes médicaux d’Éryximaque (176 cd), autant qu’à son goût de l’organisation et des programmes ; n’en
(214 d). De son côté Socrate donne à entendre que c’est Alcibiade qui le poursuit de ses assiduités ; cf. 222 a-e. Voir Notice p. cvii sq.