Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome VI.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
371 a
69
LA RÉPUBLIQUE

Nous aurons donc besoin de commerçants ?

Assurément.

Et si le commerce se fait par mer, il nous faudra encore beaucoup d’autres artisans, bj’entends ceux qui sont versés dans le métier de marins.

Il en faudra beaucoup.


Tableau de la vie
simple et saine d’un
État primitif.

XII  Mais dans l’intérieur même de la cité, comment les citoyens se feront ils part les uns aux autres des produits de leur travail respectif ? Car c’est précisément pour cela que nous avons fait une société et fondé un État.

Il est évident, dit-il, que ce sera par vente et par achat.

De là la nécessité d’un marché et d’une monnaie, signe de la valeur des objets échangés.

Assurément.

cMais si le laboureur ou quelque autre artisan, apportant au marché quelqu’un de ses produits, n’arrive pas au même moment que ceux qui ont besoin de lui acheter sa marchandise, laissera-t-il son travail ininterrompu pour rester assis au marché ?

Point du tout, dit-il ; il y a des gens qui, voyant cet inconvénient, se chargent du service d’intermédiaires. Dans les États bien réglés, ce sont ordinairement les gens les plus faibles de santé, incapables de tout autre travail. Leur rôle est de rester au marché, dd’acheter à prix d’argent à ceux qui désirent vendre et de vendre, à prix d’argent aussi, à ceux qui désirent acheter[1].

En conséquence de ce besoin, repris-je, il y aura donc des marchands dans notre État ? N’est-ce pas le nom que l’on donne à ceux qui sont établis au marché comme intermédiaires pour l’achat et la vente, tandis que nous appelons négociants ceux qui vont d’un pays à l’autre ?

  1. Platon a très bien vu la nécessité du commerce ; mais il le remet aux mains des gens incapables de tout autre travail, « de ceux dont la perte serait un faible dommage pour l’État », comme il dit dans les Lois, 919 C. Il les méprise encore à un autre titre, parce que ce sont des hommes d’argent.